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RECYCLER LE REGARD

SARAH GENDREAU-SIMONEAU sgendreau@latribune.qc.ca

SHERBROOKE — Avec Collecte

sélective, l’exposition qu’ils présentent au Centre culturel PierreGobeil jusqu’au 4 mars, Joanne Lapointe et Étienne Plante entraînent les visiteurs au coeur de la réutilisation des déchets.

L’exposition réunit des oeuvres réalisées à partir de rebuts, d’objets trouvés dans les cours à ferraille et même en nature. Joanne Lapointe réalise des tableaux avec fils de fer, bois, verre, etc., tandis qu’Étienne Plante utilise la technique de la fonderie pour confectionner des sculptures à l’aide, principalement, de pièces de voitures, donc essentiellement d’aluminium.

Tous deux sont mus par un amour de l’environnement et de l’art, ce qui a poussé les organisateurs de l’exposition à les mettre ensemble.

« On s’est fait proposer ce duo-là et c’est magique, une belle découverte. On se complète bien et on mène la même recherche. Le mariage entre mes tableaux et les sculptures d’Étienne est harmonieux », se réjouit Joanne Lapointe.

Étienne Plante renchérit sur le fait qu’ils se rejoignent pleinement par leur « élément liant : les déchets » : « Dans nos matières, on se parle beaucoup. »

LES DÉCHETS COMME BASE

« J’aime la matière. Je découvre facilement des choses, des détails, des couleurs et des textures à partir d’objets trouvés en forêt ou sur le bord du fleuve, explique Joanne Lapointe. Ces objets m’emmènent ensuite dans toutes sortes de directions. Ce n’est donc jamais monotone. Je m’amuse tout en accomplissant un geste concret à petite échelle. »

Celle qui a développé son sens critique par rapport à l’environnement lorsqu’elle ramassait des déchets par terre, jeune, avec ses parents sent qu’elle peut utiliser ces objets à bon escient tout en créant quelque chose de ses mains.

Étienne Plante demeure du même avis. Il a d’ailleurs l’impression qu’un dialogue avec la matière s’installe.

« J’ai toujours voulu expérimenter la matière et accomplir quelque chose manuellement. Elle nous donne un feedback sur ce qu’on peut faire avec elle et sur ce qui se fait moins bien. »

Pour ce qui est du titre de l’exposition, Collecte sélective, il fait évidemment référence à la collecte de détritus.

« Au-delà de ça, c’est à notre sensibilité d’artiste de voir le potentiel de chaque objet, chaque déchet. Tellement d’efforts et d’énergie ont été dépensés pour faire la transformation de la matière. Quand on jette les choses, c’est comme si on gaspillait cette énergie-là. »

SENSIBILISER PAR L’ART

Même si ce n’est pas leur mission principale, les deux artistes espèrent que les personnes qui visiteront l’exposition remettront en question leurs pratiques ainsi que leur rapport à ce qu’ils jettent.

Étienne Plante aimerait voir une réflexion s’implanter. « Il faudrait que les gens puissent regarder les déchets différemment, qu’ils pensent quelques secondes avant de jeter quelque chose. »

Ses sculptures, qu’il façonne depuis 2020, ne dépeignent que des personnages pour une raison bien précise : montrer la relation de l’humain avec son environnement et avec la matière. « Ce qui est important dans ma démarche, c’est autant l’art en tant que tel que l’intelligence des humains par rapport à leurs gestes. »

Ses personnages ont la mine basse, le dos courbé, comme s’ils soutenaient un fardeau. Par exemple, son oeuvre Le poids de nos choix, qui a été réalisée pour le forum jeunesse de l’Accélérateur entrepreneurial Desjardins de l’Université de Sherbrooke, représente des personnages transportant les déchets d’un repas pour emporter. Elle fait référence à la collectivité qui doit porter le poids des déchets et des choix environnementaux faits par les humains.

« Ces déchets-là, ils sont là pour on ne sait pas combien de temps, mais on va être obligé de s’organiser comme société pour gérer cette matière qui nous pèse sur la tête. En même temps, les personnages de l’oeuvre effectuent un mouvement plus ou moins structuré, il y a quelque chose de chaotique. » L’oeuvre est, en plus, posée sur un baril de pétrole. Pour Joanne Lapointe, graphiste de métier, les jeunes peuvent être sensibilisés et inspirés par ce type d’oeuvres.

« J’ai concocté un petit feuillet avec les détails de certains de mes tableaux. Les enfants vont se promener dans la salle et vont essayer de trouver de quel tableau il s’agit, comme une chasse au trésor. C’est ludique, mais ça les informe aussi sur ce qu’on trouve dans la nature et sur qui ne devrait pas être là. » Pour elle, le but de faire des tableaux à partir de déchets est d’ouvrir le regard sur l’aspect non négligeable du processus de jeter, de recycler ou de réutiliser.

ARTS VISUELS

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2023-02-04T08:00:00.0000000Z

2023-02-04T08:00:00.0000000Z

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